Lorsque Kanka décide de se livrer à un projet dubstep, cela ne peut qu’attirer l’attention. Le musicien rouennais s’affiche comme une figure majeure de la scène électro dub, à l’instar de High Tone ou du Peuple De L’Herbe. Ses trois albums, dont le mémorable Don’t Stop Dub en 2005, établissaient un lien étroit avec le dub originel, et se reconnaissaient dans le "dub stepper", variation du dub roots apparue en Angleterre dès les années 1980. Alexis Langlois prend aujourd’hui le pseudonyme d’Alek6 pour coucher sa vision du dubstep, toujours chez Hammerbass, label qui héberge entre autres Dubphonic, Brain Damage ou Twilight CIrcus.
Derrière Alek6, la patte de Kanka reste sensible. Sa façon de se focaliser sur le skank, rythmé par une caisse claire régulière, n’a pas changé. Mais le tempo, lui, est modéré et rendu plus lourd, tandis que les lignes de basses s’épaississent et prennent des teintes sombres et sales. Le Français a un recours massif aux sonorités digitales, qui métallisent son dub sans toutefois le rendre froid. D’autant plus que les références à la musique de Kingston n’ont pas disparu, se retrouvant par exemple dans les intro percussives de certains titres. Inside se veut plus introspectif que ses productions antérieures, il est sans aucun doute plus mental. L’absence totale de paroles et une relative uniformité dans le rythme en font un objet à la répétition hypnotique, mais sur lequel certains s’ennuieront ferme. En effet si les beats sont bons – Kanka n’a point perdu sa superbe – le manque d’évolution des morceaux enferme l’auditeur dans une boucle lassante. Avec des pistes d’une durée moyenne de 5 min, un tel manque de progression peut s’avérer fatal.
Mais la version qu’Alek6 donne du dubstep n’est pas inintéressante. Bien distinct de celui des Anglais, son dub cadencé se base davantage sur la découpe des beats, et hérite fatalement de son passé de dub-maker. Tant qu’on arrive à se demander s’il était bien nécessaire d’enfermer le projet dans une telle étiquette. Bien que le disque convainque difficilement dans sa globalité, quelques pistes restent redoutables d’efficacité. De funestes nappes de synthés assombrissent avec délice le skank poisseux de Krimy. Et lorsque les beats adoptent un rythme enlevé (Station), lorgnant vers la drum’n bass et teintés d’effets wobble, on ne peut que s’en satisfaire.
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